MAGNY, Olivier de
Sonnet à Mesme
Ce que j'aime au printemps, je te veux dire, Mesme ;
J'aime à fleurer la rose, et l'oeillet, et le thym,
J'aime à faire des vers, et me lever matin
Pour, au chant des oiseaux, chanter celle que j'aime.
En été, dans un val, quand le chaud est extrême
J'aime à baiser sa bouche et toucher son tétin
Et sans faire autre effet, faire un petit festin
Non de chair, mais de fruit, de fraises et de crème.
Quand l'automne s'approche et le froid vient vers nous
J'aime avec la chastaigne avoir de bon vin doux
Et assis près du feu, faire une chère lye.
En hiver, je ne puis sortir de la maison,
Si n'est au soir, masqué ; mais, en cette saison,
J'aime fort à coucher dans les bras de ma mie.
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Donnez au tourment de mon coeur
Castianire quelque trêve,
n’empêchant que cette liqueur
mes esprits altérez abreuve,
c’est par là que votre nom beau
dédaigne et ne craint le tombeau,
arraché de sa creuse panse,
par mes vers, veufs de récompense.
celui veux chanter (si je puis)
qui devant moi vous a chantée,
non enflammé comme je suis
d’une âpre ardeur inusitée,
mais en révélant les secrets
de l’aveugle (clarté des grecs)
et sonnant après lui la guerre,
qui de son bruit emplit la terre.