LAMA, SERGE


Je Suis Malade


Je ne rêve plus

Je ne fume plus

Je n'ai même plus d'histoire

Je suis sale sans toi

Je suis laide sans toi

Comme une orpheline dans un dortoir

Je n'ai plus envie

De vivre ma vie

Ma vie cesse quand tu pars

Je n'ai plus de vie

Et même mon lit

Se transforme en quai de gare

Quand tu t'en vas


Je suis malade

Complètement malade

Comme quand ma mère sortait le soir

Et qu'elle me laissait seule avec mon désespoir

Je suis malade

Parfaitement malade

T'arrives on ne sait jamais quand

Tu pars on ne sait jamais où

Et ça va faire bientôt deux ans

Que tu t'en fous


Comme à un rocher

Comme à un péché

Je suis accroché à toi

Je suis fatiguée, je suis épuisée

De faire semblant d'être heureuse

Quand ils sont là

Je bois toutes les nuits

Et tous les whiskys

Pour moi ont le même goût

Et tous les bateaux

Portent ton drapeau

Je ne sais plus où aller tu es partout


Je suis malade

Complètement malade

Je verse mon sang dans ton corps

Et je suis comme un oiseau mort

Quand toi tu dors

Je suis malade

Parfaitement malade

Tu m'as privée de tous mes chants

Tu m'as vidée de tous mes mots

Pourtant moi j'avais du talent

Avant ta peau


Cet amour me tue

Si ça continue

Je crèverai seule avec moi

Près de ma radio

Comme un gosse idiot

En écoutant ma propre voix qui chantera


Je suis malade

Complètement malade

Comme quand ma mère sortait le soir

Et qu'elle me laissait seule avec mon désespoir

Je suis malade

C'est ça

Je suis malade

Tu m'as privée de tous mes chants

Tu m'as vidée de tous mes mots

Et j'ai le cœur complètement malade

Cerné de barricades

T'entends

Je suis malade


Je t'aime

Une tache d'été qui rit sur la théière

Et des tranches de pain où le beurre a fondu

Respirer sur ta joue ton souffle et ta lumière

Marcher sur un trottoir, rêver, rêver de prendre un train


Et cette déchirure, au matin, de mon ventre

Et nos corps épuisés qui s'ébrouent dans leur bain

Et lorsque je t'étreins et lorsque je t'éventre

Et lorsque tu me tues et lorsque tu me tiens


Envie de me jeter cent fois par la fenêtre

Par celle de tes yeux, par celle de ton corps

Lire et relire encore cent fois la même lettre

Te dire que je t'aime et te redire encore


Que je t'aime, mieux que ça, je t'aime

C'est mon cri, c'est mon anathème

Et je te l'aboierai longtemps

Jusqu'après le dernier volcan


Je t'aime, t'aime, t'aime tendre

Je t'aime la pluie et la cendre

Je t'aime la braise et le vent


Je t'aime comme les baleines

Aiment l'homme qui les entraîne

Vers le harpon qui les attend


Je t'aime à graver sur ta tombe

Des mots comme des trous de bombe

À faire éclater le ciment

De tous les bunkers des Allemands


Oui, je t'aime, mieux que ça, je t'aime

Si la pluie manque à mes fontaines

Quitte à mourir en le chantant

Je l'écrirai avec mon sang


Que je t'aime, mieux que ça, je t'aime

Mieux qu'un cri, c'est presque un blasphème

C'est Dieu qui couche avec Satan

Dans le lit de la nuit des temps

Quand je t'aime

Je t'aime, je t'aime