ANDREA, Jean-Baptiste



Veiller sur elle

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Je n’en voulus jamais à mes parents. Si la pierre fit ce que je suis, si une magie noire était à l’œuvre, elle me combla aussi de ce qu’elle me prit. La pierre me parla toujours, toutes les pierres, calcaires, métamorphiques, tombales même, celles sur lesquelles je me coucherais bientôt pour écouter des histoires de gisants.

– Ce n’est pas ce qui était prévu, murmura l’ingegnere, se tapotant les lèvres d’un doigt ganté. C’est fâcheux.

Il neigeait dru maintenant. Zio Alberto haussa les épaules, voulut nous claquer la porte au nez. L’ingegnere la bloqua du pied. Il tira l’enveloppe de ma mère de la poche intérieure de son vieux manteau de fourrure, la tendit à mon oncle. Il y avait là presque toutes les économies des Vitaliani. Des années d’exil, de labeur, de peau brûlée par le soleil et le sel, de recommencements, des années de marbre sous les ongles, avec parfois une once de cette tendresse qui m’avait vu naître. C’est pour ça que ces billets sales et froissés étaient précieux. Pour ça que Zio Alberto rouvrit un peu la porte.

– Cette somme était pour le petit. Je veux dire, Mimo, corrigea-t-il en rougissant. Si Mimo est d’accord pour vous la donner, il ne serait plus un apprenti, mais un associé.

Zio Alberto acquiesça lentement.

– Hmm, un associé.

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