FERRÉ, Léo
C’est extra
Une robe de cuir comme un fuseau
Qu'aurait du chien sans l'faire exprès
Et dedans comme un matelot
Une fille qui tangue un air anglais
C'est extra
Un moody blues qui chante la nuit
Comme un satin de blanc marié
Et dans le port de cette nuit
Une fille qui tangue et vient mouiller
C'est extra c'est extra
C'est extra c'est extra
Des cheveux qui tombent comme le soir
Et d'la musique en bas des reins
Ce jazz qui d'jazze dans le noir
Et ce mal qui nous fait du bien
C'est extra
Ces mains qui jouent de l'arc-en-ciel
Sur la guitare de la vie
Et puis ces cris qui montent au ciel
Comme une cigarette qui prie
C'est extra c'est extra
C'est extra c'est extra
Ces bas qui tiennent hauts perchés
Comme les cordes d'un violon
Et cette chair que vient troubler
L'archet qui coule ma chanson
C'est extra
Et sous le voile à peine clos
Cette touffe de noir jésus
Qui ruisselle dans son berceau
Comme un nageur qu'on attend plus
C'est extra c'est extra
C'est extra c'est extra
Une robe de cuir comme un oubli
Qu'aurait du chien sans l'faire exprès
Et dedans comme un matin gris
Une fille qui tangue et qui se tait
C'est extra
Les moody blues qui s'en balancent
Cet ampli qui n'veut plus rien dire
Et dans la musique du silence
Une fille qui tangue et vient mourir
C'est extra
C'est extra
C'est extra
C'est extra
Avec le temps, va, tout s'en va On oublie le visage et l'on oublie la voix Le cœur, quand ça bat plus, c'est pas la peine d'aller Chercher plus loin, faut laisser faire et c'est très bien
Avec le temps, va, tout s'en va L'autre qu'on adorait, qu'on cherchait sous la pluie L'autre qu'on devinait au détour d'un regard Entre les mots, entre les lignes et sous le fard D'un serment maquillé qui s'en va faire sa nuit Avec le temps tout s'évanouit
Avec le temps, va, tout s'en va Même les plus chouettes souvenirs ça t'as une de ces gueules A la galerie je farfouille dans les rayons de la mort Le samedi soir quand la tendresse s'en va toute seule
Avec le temps, va, tout s'en va L'autre à qui l'on croyait pour un rhume, pour un rien L'autre à qui l'on donnait du vent et des bijoux Pour qui l'on eût vendu son âme pour quelques sous Devant quoi l'on s'traînait comme traînent les chiens Avec le temps, va, tout va bien
Avec le temps, va, tout s'en va On oublie les passions et l'on oublie les voix Qui vous disaient tout bas les mots des pauvres gens Ne rentre pas trop tard, surtout ne prends pas froid
Avec le temps, va, tout s'en va Et l'on se sent blanchi comme un cheval fourbu Et l'on se sent glacé dans un lit de hasard Et l'on se sent tout seul peut-être mais peinard Et l'on se sent floué par les années perdues Alors vraiment... avec le temps... on n'aime plus
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Mettertijd verdwijnt alles, gaat alles weg, we vergeten het gezicht en we vergeten de stem, als het hart niet meer klopt, is ‘t de moeite niet om verder te gaan zoeken, je moet loslaten en da’s maar goed.
Mettertijd verdwijnt alles, gaat alles weg, de ander die we aanbaden, die we zochten in de regen, de ander die we met afgewende blik vermoedden tussen de woorden, tussen de lijnen en onder het mom van holle eden van iemand die boemelend de nacht ingaat. Mettertijd verzwindt alles.
Mettertijd verdwijnt alles, gaat alles weg, zelfs de leukste herinneringen, waarbij je smoelen trekt; in de toonzaal doorsnuffel ik de schappen van de dood, zaterdagavond wanneer de tederheid vanzelf verdwijnt.
Mettertijd verdwijnt alles, gaat alles weg, die ander in wie we geloofden om een niemendal, om niets, die ander aan wie we beloften deden en kleinoden gaven, voor wie we onze ziel voor een paar stuivers zouden verkocht hebben, waarvoor we kropen zoals honden dat doen. Mettertijd gaat alles, alles goed.
Mettertijd tijd verdwijnt alles, gaat alles weg, we vergeten de passie en we vergeten de stemmen die je woorden toefluisterden zoals arme sloebers doen: kom op tijd terug thuis, vat vooral geen kou.
Mettertijd verdwijnt alles, gaat alles weg, en we voelen ons vergrijsd als een afgemat paard en we voelen ons verkleumd in een toevallig bed en we voelen ons misschien helemaal alleen, maar wel op ons gemak en we voelen ons bedot door de verloren jaren. Dus, werkelijk ... mettertijd ... hebben we niet meer lief.
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Tu penses à quoi?
Tu penses à qoi?
A la langueur du soir dans les trains du tiers monde?
A la maladie louche? Aux parfums de secours?
A cette femme informe et qui pourtant s'inonde?
Aux chagrins de la mer planqués au fond des cours?
Tu penses à quoi?
A l'avion malheureux qui cherche un champ de blé?
A ce monde accroupi les yeux dans les étoiles?
A ce mètre inventé pour mesurer les plaies?
A ta joie démarrée quand je mets à la voile?
Tu penses à quoi?
A cette rouge gorge accrochée à ton flanc?
Aux pierres de la mer lisses comme des cygnes?
Au coquillage heureux et sa perle dedans
Qui n'attend que tes yeux pour leur faire des signes?
Tu penses à quoi?
Aux seins exténués de la chienne maman?
Aux hommes muselés qui tirent sur la laisse?
Aux biches dans les bois? Au lièvre dans le vent?
A l'aigle bienheureux? A l'azur qu'il caresse?
Tu penses à quoi?
A l'imagination qui part demain matin?
A la fille égrenant son rosaire à pilules?
A ses mains mappemonde où tremble son destin?
A l'horizon barré où ses rêves s'annulent?
Tu penses à quoi?
A ma voix sur le fil quand je cherche ta voix?
A toi qui t'enfuyais quand j'allais te connaître?
A tout ce que je sais et à ce que tu crois?
A ce que je connais de toi sans te connaître?
Tu penses à quoi?
A ce temps relatif qui blanchit mes cheveux?
A ces larmes perdues qui s'inventent des rides?
A ces arbres datés où traînent des aveux?
A ton ventre rempli et à l'horreur du vide?
Tu penses à quoi?
A la brume baissant son compteur sur ta vie?
A la mort qui sommeille au bord de l'autoroute?
A tes chagrins d'enfant dans les yeux des petits?
A ton coeur mesuré qui bat coûte que coûte?
Tu penses à quoi?
A ta tête de mort qui pousse sous ta peau?
A tes dents déjà mortes et qui rient dans la tombe?
A cette absurdité de vivre pour la peau?
A la peur qui te tient debout lorsque tout tombe?
Tu penses à quoi? dis,
A moi? des fois?...
Je t'aime.
La Solitude
Je suis d´un autre pays que le vôtre, d´une autre quartier, d´une autre solitude.
Je m´invente aujourd´hui des chemins de traverse. Je ne suis plus de chez vous. J´attends des mutants.
Biologiquement, je m´arrange avec l´idée que je me fais de la biologie : je pisse, j´éjacule, je pleure.
Il est de toute première instance que nous façonnions nos idées comme s´il s´agissait d´objets manufacturés.
Je suis prêt à vous procurer les moules.
Mais...
La solitude...
…..
Les moules sont d´une texture nouvelle, je vous avertis. Ils ont été coulés demain matin.
Si vous n´avez pas, dès ce jour, le sentiment relatif de votre durée, il est inutile de vous transmettre, il est inutile de regarder devant vous car devant c´est derrière, la nuit c´est le jour.
Et...
La solitude...
…..
Il est de toute première instance que les laveries automatiques, au coin des rues, soient aussi imperturbables que les feux d´arrêt ou de voie libre.
Les flics du détersif vous indiqueront la case où il vous sera loisible de laver ce que vous croyez être votre conscience et qui n´est qu´une dépendance de l´ordinateur neurophile qui vous sert de cerveau.
Et pourtant...
La solitude...
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Le désespoir est une forme supérieure de la critique. Pour le moment, nous l´appellerons "bonheur", les mots que vous employez n´étant plus "les mots" mais une sorte de conduit à travers lequel les analphabètes se font bonne conscience. Mais...
La solitude...
…..
Le Code Civil, nous en parlerons plus tard. Pour le moment, je voudrais codifier l´incodifiable. Je voudrais mesurer vos danaïdes démocraties. Je voudrais m´insérer dans le vide absolu et devenir le non-dit, le non-avenu, le non-vierge par manque de lucidité.
La lucidité se tient dans mon froc!
Dans mon froc!