DRELINCOURT, Laurent


Sur les vents

Voix sans poumons, corps invisibles,

Lutins volants, char des oiseaux,

Vieux courriers, postillons nouveaux;

Sur terre, et sur mer, si sensibles;


Doux médecins, bourreaux terribles,

Maîtres de l'air, tyrans des eaux,

Qui rendez aux craintifs vaisseaux

Les ondes fières ', ou paisibles ;


Vents, qui, dans un cours inconstant,

Naissez, et mourez, chaque instant,

Mes jours ne sont qu'un vent qui passe.


Mon corps fait naufrage en la mort,

Mais Dieu, du souffle de sa grâce,

Pousse mon âme dans le port.


Sur la Résurrection,

Ainsi, Vase de terre, ainsi, Corps languissant,

Portative Maison, Tabernacle fragile,

Et, d’un Tout précieux, Moitié faible et débile,

Tu t’en vas fondre, enfin ; tu t’en vas périssant.


Mais en Toi je m’assure, ô Sauveur Tout-Puissant !

Ta Parole, ton Bras, à qui tout est facile,

M’enlevant du Tombeau, feront de cette Argile,

Au Matin du grand jour, un Corps resplendissant.


Oui, que bientôt mes yeux soient privés de Lumière :

Que mes Mains, et mes Pieds, dans l’affreuse Poussière,

Servent et de Victime et de Pâture aux Vers ;

Ces yeux doivent, un Jour, contempler ton Visage ;
Ces Mains t’applaudiront, Juge de l’Univers ;

Et ces Pieds te suivront au Céleste Héritage.