VENAILLE, Franck
Face tragique, corps menacé, rebelle à jamais
A jamais différent de ceux pourvus de tout.
Croyant pourtant à semblables chimères en d’
identiques rêveries conservées de l’enfance.
Il fredonne et cela donne ce léger clapotis
dans sa pensée, bleuté toutefois, pareil à cet
alcool trop amer que, frissonnant, l’on boit.
Tout juste un homme fait de sa propre mort
qui apprivoise les moineaux ceux-là gris de
douleur compagnons modestes de chambrée.
L’égal des grands soleils, du midi formidable,
de cette lame à vif qui perce le couchant.
Face tragique, corps menacé, rebelle à jamais.
Tragique
Je suis probablement un homme mauvais.
Grinçant de haine quand ma salive malade
coule de mes lèvres, là, sur ma poitrine.
Demandez-moi d'être heureux et me voici
lamentable et quelconque, vie ne se vaut
qu'en lambeaux épars sur un mur lépreux.
Enfant, j'aimais l'intimité des bas noirs
il m'en reste une attirance envers ce qui
brûle, ce qui exalte, ce qui fuit, hélas.
A pleine bouche je mords de rage, puis
solitaire, toujours vers l'ombre, m'enfuis.
J'ai peur. Je pleure. Ah, trop sensible suis!
…..
mal à vivre ô que j’eus peine à trouver mon chemin parmi ronces et broussailles tous ces fruits rouges que je cueillais avec élégance avant de leur confier écrasé dans ma paume mon désespoir d’enfant.
cendre au plus profond du corps du fleuve. Où la mer se noie ! Plonger ! Plonger ! Puis retrouver ce monde de si peu de joie. …..
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aan het leven o wat moest ik moeite doen om mijn weg te vinden tussen braam en struikgewas al dat rood fruit dat ik sierlijk plukte vooraleer het, geplet in mijn handpalm, mijn kinderlijke wanhoop
toe te vertrouwen
dalen in het aller- diepste van het hart van de stroom. Waar de zee ver- drinkt ! Ondergaan Zinken ! Daarna deze wereld die zo weinig vreugde biedt,
terugzien.
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La descente de l’Escaut
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L'eau Toute l'eau L'eau encore elle L'eau de
toujours suffira-t-elle cette eau à laver le
marcheur de ses fautes ? Dans un calme propre-
ment effrayant Le ciel et l'eau ne me dites pas
qu'ils vont s'absorber ! Que l'un et l'autre vont
copuler et, d'extase, se retourner, se vautrer, faire
pleuvoir ! Tout est si calme On n'entend que les
pas du marcheur à l'odée fixe : toute cette eau y
parviendra-t-elle ?
Du vaste paysage autrefois immergé s'
Elève une plainte dont nul ne connaît l'origine
Exprime-t-elle ce que les hommes nomment : la
Douleur ? Dit-elle ce, qu'à eux-mêmes, se cachent
Les peupliers serrés comme autant de frères au-
Tour de la dépouille du père Et qui geignent !
Disant l'angoisse ancestrale des pays plats
devant la montée de l'eau Ah ! Tous ces arbres
Dressés à l'intérieur même du fleuve Que je ne
sais pas voir mais dont je sens la solitude
Tels les grands crucifiés à l'angle des plaines !
…..
On marche dans la fêlure intime du monde
Ces soubresauts nés de la douleur primitive
Quelle est la voix qui le dira ? Quel sera
ce corps qui saura mener jusqu'à son terme la
Valse triste ? Une voix s'élève à l'intérieur
de nous-mêmes – voix chère – exprimant ce qui s'
apparente à l'expression de la plainte première
Je suis cet homme-là qui, tant et tant, crut aux ver-
Tiges et qui, désormais, dans la déchirure du lan-
gage se tient, regard clair, miné toutefois, blessé
Dans la fêlure du monde où les plaies suintent.
…..
Toutes les péniches descendent vers Gand ô
sur elles, se retourner, et parler à voix haute
Dire : soleil - immensité - calme des prés et
ce parti pris de la beauté : l'immuable, l'infi-
ni Mais pourquoi donc ces courbes du fleuve
dans une telle plaine semée de chevaux Qui
posent leur tête dans ma main Douceur sans âge
Puis, sur l'herbe, distinguer la marque des fers
de leurs sabots