BATAILLE, Georges



Je mets mon vit contre ta joue


Je mets mon vit contre ta joue

le bout frôle ton oreille

lèche mes bourses lentement

ta langue est douce comme l'eau

 
ta langue est crue comme une bouchère

elle est rouge comme un gigot

sa pointe est un coucou criant

mon vit sanglote de salive

 
ton derrière est ma déesse

il s'ouvre comme ta bouche

je l'adore comme le ciel

je le vénère comme un feu

 
je bois dans ta déchirure

j'étale tes jambes nues

je les ouvre comme un livre

où je lis ce qui me tue.



Je rêvais de toucher


Je rêvais de toucher la tristesse du monde

au bord désenchanté d'un étrange marais

je rêvais d'une eau lourde où je retrouverais

les chemins égarés de ta bouche profonde


j'ai senti dans mes mains un animal immonde

échappé à la nuit d'une affreuse forêt

et je vis que c'était le mal dont tu mourais

que j'appelle en riant la tristesse du monde


une lumière folle un éclat de tonnerre

un rire libérant ta longue nudité

une immense splendeur enfin m'illuminèrent


et je vis ta douleur comme une charité

rayonnant dans la nuit la longue forme claire

et le cri de tombeau de ton infinité.



L’éclair tue


L’éclair tue

retourne les yeux

la joie

efface

la joie

effacée

vitre de mort

glacée

ô vitre

resplendissante

d’un éclat qui se brise

dans l’ombre qui se fait

je suis

ce qui n’est pas

j’ouvre

les dents mêlées

des morts

et les grincements de la lumière

qui m’enivre

de l’étreinte

qui s’étouffe

de l’eau

qui pleure

de l’air mort

et de l’âme de l’oubli


Mademoiselle Mon Cœur


Tu es belle comme on tue

Le coeur démesuré j'étouffe

Ton ventre est nu comme la nuit


Ma putain

Mon coeur

Je t'aime comme on chie


Trempe ton cul dans l'orage

Entouré d'éclairs

C'est la foudre qui te baise


Un fou brame dans la nuit

qui bande comme un cerf

Ô mort je suis ce cerf

Que dévorent les chiens

La mort éjacule en sang



Le loup soupire lentement


Le loup soupire tendrement

dormez la belle châtelaine

le loup pleurait comme un enfant

jamais vous ne saurez ma peine

le loup pleurait comme un enfant


La belle a ri de son amant

le vent gémit dans un grand chêne

le loup est mort pleurant le sang

ses os séchèrent dans la plaine

le loup est mort pleurant le sang.



Je n'ai rien à faire en ce monde sinon de brûler

Je n'ai rien à faire en ce monde

sinon de brûler

je t'aime à en mourir


ton absence de repos

un vent siffle dans ma tête

tu es malade d'avoir ri

tu me fuis pour un vide amer

qui te déchire le cœur


déchire moi si tu veux

mes yeux te trouvent dans la nuit

brûlés de fièvre.



La Nuit est ma nudité


La nuit est ma nudité

les étoiles sont mes dents

je me jette chez les morts

habillé de blanc soleil.


La mort habite mon coeur

comme une petite veuve

elle sanglote elle est lâche

j’ai peur je pourrai vomir

la veuve rit jusqu’au ciel

et déchire les oiseaux.
…..